Observer la masculinité violente en train de se faire au sein de la relation d’enquête. Retour réflexif sur une recherche avec des auteurs de violences conjugales

Cette contribution souhaite analyser les dynamiques de la violence de genre au sein de la relation d’enquête et la manière dont elle s’est révélée au cours d’un terrain ethnographique conduit en France auprès d’hommes adultes et hétérosexuels auteurs de violences conjugales. Après avoir présenté le contexte et la méthodologie d’enquête, l’article se focalise sur deux rencontres spécifiques, analysées à partir du journal de terrain : un premier entretien avec un homme qui fait l’objet d’une interdiction de contact avec son épouse, et un deuxième avec un homme qui, de manière inattendue, s’est présenté au rendez-vous accompagné par la victime de ses violences. Chaque rencontre, coconstruite par l’enquêtrice et l’enquêté en raison de l’imbrication de plusieurs rapports sociaux (race, classe, sexe, âge et origine), est devenue une occasion d’observer pratiquement la mise en scène stratégique du genre et son rapport à la violence, ainsi que la façon dont cette dimension a permis aux enquêtés de se situer dans une position hiérarchique dominante vis-à-vis de la chercheuse. Le questionnement réflexif permet ici de comprendre les effets de la violence masculine contre les femmes non seulement dans l’intimité mais aussi dans la relation d’enquête ; en même temps, il contribue à éclairer les limites et les atouts de l’approche ethnographique qui, en tant que telle, présuppose la proximité et l’engagement personnel par les corps.

mots-clés : violences conjugales, genre, masculinités, réflexivité, subjectivité, émotions, ethnographie


Numéro 44 – Décembre 2022 Le genre en train de se faire : trouble dans le terrain

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