Les étiologies vernaculaires du psoriasis
Cet article présente les premiers résultats d’une enquête ethnographique menée en France et en Belgique auprès de personnes atteintes de psoriasis. Il interroge ce qu’elles ont appris de leur maladie, comment elles ont acquis ces connaissances et quelle attitude elles entretiennent à son égard. L’enquête met en évidence trois attitudes possibles. La première consiste à ne pas chercher à savoir afin d’éviter de s’exposer aux conséquences affectives négatives d’une information à laquelle on ne serait pas préparé. La deuxième consiste à faire avec les informations disponibles, ce qui signifie souvent se contenter de savoirs lacunaires, à demi compris et s’accommoder des angles morts de la compréhension du pourquoi et du comment de sa maladie. Une troisième attitude consiste à chercher à comprendre le mode de fonctionnement du psoriasis dans le but de multiplier les prises et les moyens d’action sur son psoriasis. Cette compréhension est, la plupart du temps, plurivoque, partielle et changeante au cours du cheminement avec la maladie. La construction d’une étiologie vernaculaire du psoriasis s’apparenterait moins à un processus de thésaurisation de connaissances qu’à l’apprentissage d’une capacité à se saisir de savoirs utiles, de ceux qui permettent une prise sur la maladie et sur ses conséquences dans la vie au quotidien. Savoir consiste alors à potentialiser un pouvoir d’agir quitte à s’accommoder de la part de mystère voire, dans certains cas, à suspendre ou renoncer à la quête de sens qui caractérise le plus souvent le cheminement avec une maladie chronique.
mots-clés : psoriasis, étiologies vernaculaires, attitudes épistémiques, pratiques de connaissances, pouvoir d’agir